Les Nations unies condamnent le programme canadien pour les travailleurs étrangers temporaires, qu'elles considèrent comme un « terreau » pour l'esclavage contemporain
Toronto (Ont.) – Le 14 août 2024 – Un nouveau rapport de l'ONU condamne le programme canadien des travailleurs étrangers temporaires dans un réquisitoire cinglant; le rapport réitère bon nombre des critiques que les TUAC émettent depuis des décennies au sujet de l'exploitation systémique au sein du système.
Le rapport de Tomoya Obokata, rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines d'esclavage, indique que « le programme des travailleurs étrangers temporaires sert de terreau aux formes contemporaines d'esclavage, car il institutionnalise des asymétries de pouvoir qui favorisent les employeurs et empêchent les travailleurs d'exercer leurs droits. »
Le programme de travail temporaire à l'étranger exige que le statut migratoire des travailleur(euse)s dépende d'un permis de travail fermé spécifique à l'employeur, ce qui crée un déséquilibre de pouvoir systémique fondamental entre l'employeur et le ou la travailleur(euse). Les travailleur(euse)s n'ont que peu ou pas de ressources contre un employeur déloyal, car ils et elles dépendent de leur employeur pour le logement, les soins de santé et le statut migratoire. En outre, le rapport souligne que, pour de nombreux(euse) travailleur(euse)s saisonnier(ère)s, existe la peur de perdre leur emploi et d'être expulsé(e) en raison de la servitude pour dettes.
Les TUAC ont passé des décennies à défendre les intérêts des travailleur(euse)s migrant(e)s et à demander aux gouvernements fédéral et provinciaux de réformer le programme et de permettre aux travailleur(euse)s migrant(e)s de jouir pleinement de leurs droits humains et syndicaux; c'est une honte nationale et un embarras pour le Canada que le programme soit mené de cette manière. Les TUAC publient un rapport annuel sur la situation des travailleurs agricoles migrants au Canada et font pression depuis des décennies à Ottawa pour que des changements soient apportés au programme.
Le rapport attire particulièrement l'attention sur l'absence de droits syndicaux pour les travailleur(euse)s migrant(e)s au Canada : « Tous les travailleurs devraient avoir des droits syndicaux, mais il existe des obstacles pour les travailleurs migrants. Ils ne sont pas toujours représentés par des syndicats, en particulier dans les secteurs de l'agriculture et des soins, où tous les travailleurs n'ont pas de droits syndicaux fédéraux. Dans le cadre du programme des travailleurs agricoles saisonniers, les travailleurs ne peuvent pas négocier leurs conditions de travail, car leurs contrats sont négociés entre le gouvernement et les pays d'origine. Le rapporteur spécial a également rencontré des travailleurs qui avaient été licenciés sur le champ pour avoir exercé leurs droits syndicaux. »
Les programmes de travail temporaire du Canada doivent refléter les directives de l'OIT sur le travail décent dans le secteur agroalimentaire, y compris le principe fondamental des droits au travail. Les travailleur(euse)s agricoles migrant(e)s sont l'épine dorsale de l'industrie agroalimentaire du Canada : ils et elles ont droit à un travail juste et décent.
En outre, alors que le projet pilote agroalimentaire prévoit certaines voies d'accès à la résidence permanente pour les travailleur(euse)s agricoles migrant(e)s, le rapport de l'ONU indique que des voies d'accès plus claires à la résidence permanente sont nécessaires pour les travailleur(euse)s migrant(e)s.
Le rapport se termine par une série de recommandations, dont un appel au gouvernement canadien pour qu'il mette fin à l'utilisation de régimes de permis de travail fermés et pour qu'il accorde à tous et toutes les travailleur(euse)s le droit de choisir et de changer d'employeur.