Fermer les paradis fiscaux et les échappatoires

Toronto – 12 mai 2016 – La publication des « Panama Papers » (documents panaméens) et l’ouverture au grand public d’une base de données où l’on peut faire des recherches sur des noms et des entreprises mentionnés dans les documents ont eu pour effet d’exposer davantage les échappatoires fiscales et les leurres qui permettent aux personnes les plus riches d’éviter de payer leur juste part d’impôt.

Les documents publiés citent 625 noms de particuliers et d’entreprises canadiens. Selon les données officielles d’Ottawa, des richesses canadiennes de l’ordre de 200 milliards $ se trouvent à l’étranger et hors de portée de l’Agence du revenu du Canada (ARC). Des données de Statistique Canada chiffrent à quelque 7,8 milliards $ les pertes de revenus fiscaux que les  gouvernements fédéral et provinciaux subissent chaque année à cause des paradis fiscaux. 

La ministre fédérale du Revenu, Diane Lebouthillier, a ordonné à l’ARC d’utiliser les documents pour procéder à des vérifications et retrouver les coupables de fraudes fiscales en disant que le gouvernement n’hésiterait pas à porter des accusations criminelles si la situation se présentait. Mais le dossier des gouvernements et de l’ARC en matière de répression des évasions fiscales nous fait douter que cela puisse se produire un jour. Il ne faut pas qu’on oublie qu’il n’y a pas si longtemps l’ARC a secrètement accordé une amnistie extrajudiciaire pour les leurres que le cabinet comptable KPMG utilisait pour aider ses riches clients à transférer leurs avoirs dans des paradis fiscaux d’outre-mer afin d’éviter de payer l’impôt au Canada. Grâce à l’amnistie, quinze riches clients de KPMG éviteront des pénalités, des amendes et des enquêtes criminelles. 

La déclaration de la ministre quant aux accusations criminelles que le gouvernement pourrait porter pose un autre problème. C’est que beaucoup de ces stratagèmes d’évitement fiscal ne sont pas illégaux, car ils exploitent les échappatoires fiscales que créent parfois des ententes comme les accords de libre-échange.    

Presque tous les députés conservateurs et libéraux actuellement en fonction ont voté en 2012 en faveur de la ratification d’un accord de libre-échange avec le Panama, lequel éliminait les droits de douane sur 99 % des échanges entre les deux pays, y compris les services financiers, ce malgré les avertissements émis par le NPD et d’autres partis à propos de la réputation du Panama comme paradis fiscal.

Nos gouvernements ont bel et bien facilité les évasions fiscales. Il convient de se rappeler la croisade de Stephen Harper contre les organismes de bienfaisance sous prétexte qu’ils menaient des activités politiques et que M. Harper est même allé jusqu’à réduire le personnel chargé de faire enquête sur les évasions fiscales.  Les professionnels de l’évasion fiscale (avocats, planificateurs financiers, banquiers et comptables) se multiplient de plus en plus. Ils font leur beurre en conseillant les riches sur les endroits où mettre leur argent pour se soustraire à leurs obligations de payer l’impôt au Canada et sur la manière de le faire.  

La création d’une société outre-mer n’est peut-être pas illégale, mais c’est une entreprise manifestement injuste. C’est un autre avantage que l’on donne aux personnes qui sont déjà riches et surprivilégiées. L’ARC devrait donc utiliser les documents panaméens et autres documents connexes pour retrouver les coupables de fraudes fiscales. Il est temps que notre gouvernement et les gouvernements des autres pays du monde  ferment les paradis fiscaux et les échappatoires pour faire en sorte que les riches et les surprivilégiés paient leur juste part.