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Une victoire pour les travailleurs agricoles qui met en évidence les trop nombreux abus subsistant dans nos fermes
Montréal – 5 mai 2016 – Le syndicat des Travailleurs et des Travailleuses unis de l’alimentation et du commerce au Québec (TUAC), qui milite pour le respect et la reconnaissance des droits des travailleurs agricoles depuis plus de 26 ans déjà, se réjouit de la décision du Tribunal administratif du travail d’indemniser quatre travailleurs agricoles saisonniers victimes de harcèlement psychologique de la part de leur employeur. Toutefois, cette importante victoire témoigne de l’inefficacité du modèle de représentation prévue par la loi. Ne disposant d'aucun mécanisme légal et fonctionnel leur permettant de faire respecter leurs droits au travail, ces travailleurs étaient foncièrement laissés à eux-mêmes et à la « bonne foi » d’un employeur qui, de son côté, voyait ses intérêts économiques servis.
À la lecture des faits exposés dans la décision de la juge administrative Andrée St-Georges, il y a de quoi s’indigner des conditions qui prévalent encore et toujours dans certaines fermes du Québec : « Le fait d’offrir à des travailleurs migrants un logement inadéquat, de ne pas les équiper pour qu’ils puissent facilement se ravitailler, de les rabrouer et de les humilier de diverses manières quand ils font leur travail, alors qu’ils n’y sont pas préparés adéquatement ou que les consignes sont contradictoires, de les obliger à fumiger sans protection, de les réveiller pour aller travailler quand ils manquent de sommeil, de ne pas les payer selon le contrat convenu et en deçà des heures travaillées en leur laissant entendre que c’est déjà bien rémunéré en comparaison de ce qu’ils pourraient gagner dans leur pays, tous ces comportements pris dans leur ensemble, ces paroles, ces actes ou ces gestes répétés sont sans nul doute, pour paraphraser la définition citée plus haut, hostiles ou non désirés, de nature à porter atteinte à leur dignité ou à leur intégrité psychologique ou physique et ayant entraîné pour eux un milieu de travail néfaste. »
Par conséquent, le tribunal a ordonné à l’employeur de verser à chacun 6 000 $ à titre de dommages moraux et punitifs ainsi que les frais qu’ils ont encourus en plus du salaire qu’ils ont perdu en raison de la tenue de l’une ou l’autre des six journées d’audience. À cela s’ajoutent les frais engendrés par le soutien psychologique requis en raison du harcèlement psychologique dont l’un des travailleurs a été victime.
« Pour le syndicat des TUAC, il est clair que le cadre législatif instauré par les deux paliers de gouvernement vulnérabilise les travailleurs agricoles et les empêche d’avoir accès à des conditions de travail décentes comme c’est le cas pour tous les travailleurs et les travailleuses au pays. Si le droit à la syndicalisation avait été accordé à ces travailleurs, nous aurions travaillé en amont pour prévenir ce genre de situation plutôt que d’appliquer un remède qui n’effacera jamais le traumatisme qu’ils ont vécu. La syndicalisation demeure la seule façon de faire respecter leurs droits et de les protéger contre l’arbitraire patronal. Or, la loi québécoise ne permet ni l’un ni l’autre », déclare le président national des TUAC Canada, Paul Meinema.
« Certes, nous sommes heureux pour ces travailleurs agricoles. Cette victoire vient assurément mettre un baume sur les moments difficiles qu’ils ont vécus. Malheureusement il ne s’agit pas d’un cas unique, car ce ne sont pas les histoires d’horreur qui manquent, d’où la mise sur pied de l’Alliance des travailleurs agricoles (ATA) par les TUAC. Encore aujourd’hui de nombreux travailleurs agricoles migrants rencontrent plusieurs obstacles lors de la revendication de leurs droits au travail. S’ils gardent le silence et endurent d’aussi mauvaises conditions de vie, c’est tout simplement parce qu’ils ont peur de perdre leur travail, d’être rapatriés dans leur pays sans droit de contestation et l'absence de toute garantie de rappel pour l'année suivante», d’expliquer le représentant syndical Michel Tardif, responsable du dossier des travailleurs agricoles à la section locale 501 des TUAC Canada.