Les gouvernements minoritaires, le syndicalisme et les conservateurs
Le 5 septembre, les électeurs et électrices du Québec ont élu un nouveau gouvernement minoritaire, soit celui du Parti Québécois (PQ), et le 6 septembre les gens de l’Ontario ont refusé au gouvernement de Dalton McGuinty une majorité convoitée en votant contre les libéraux dans deux élections partielles.
Il y a différentes raisons qui expliquent pourquoi les résultats du scrutin sont ce qu’ils sont dans les deux provinces. Quoi qu’il en soit, les conservateurs à Ottawa et à Toronto n’ont pas tardé à pointer du doigt le syndicalisme.
Au Québec, le PQ a pris le pouvoir de justesse avec un gouvernement minoritaire en remportant 54 sièges, contre 50 pour les libéraux, 19 pour la CAQ (un jeune parti), et deux pour le parti de gauche Québec solidaire qui a doublé son nombre de sièges. Les commentateurs et les experts en sondage avaient prédit la victoire du PQ avec un gouvernement majoritaire et la défaite des libéraux de Charest après trois mandats et neuf ans au pouvoir, mais les électeurs et électrices ne voyaient pas les choses exactement de cette façon.
Une victoire avec un gouvernement minoritaire bénéficiant d’à peine 32 % des suffrages laisse le PQ dans une position de faiblesse pour promouvoir son plan de souveraineté et l’obligera à collaborer coute que coute avec les autres partis pour adopter des lois, sinon on risque d’avoir une autre élection.
En Ontario, les pitoyables acrobaties politiques du premier ministre McGuinty ne lui ont pas permis d’obtenir un gouvernement majoritaire. Après avoir gagné pas plus qu’un gouvernement minoritaire à l’élection provinciale tenue l’automne dernier, McGuinty a orchestré une élection partielle provinciale à Kitchener—Waterloo, une circonscription que les libéraux croyaient pouvoir gagner en faisant miroiter une nomination gouvernementale au député conservateur en fonction. McGuinty a par la suite lancé une attaque contre les enseignants et enseignantes et le personnel de soutien des écoles ontariennes en adoptant des mesures législatives qui gèlent leurs salaires et leur interdisent l’exercice du droit de grève bien que les enseignants et enseignantes s’étaient déjà engagés à ne pas recourir à la grève et avaient déjà indiqué qu’ils accepteraient un gel salarial de deux ans.
Les syndicats des enseignants et enseignantes, qui ont fortement appuyé McGuinty dans les élections antérieures, ont activement travaillé à Kitchener—Waterloo pour le candidat néo-démocrate et ont aidé le NPD à arracher une victoire inattendue en s’emparant du siège qui a longtemps appartenu aux conservateurs.
Les conservateurs n’ont pas tardé à réagir aux deux victoires électorales. Au Québec, les ailes régionales de l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC) – le plus grand syndicat représentant les fonctionnaires fédéraux – sont sorties pour appuyer le PQ et Québec solidaire parce que les deux partis sont en faveur des services publics et non en raison de leur désir de souveraineté. Cela n’a pas empêché le député conservateur Pierre Poilievre de s’en prendre au syndicat pour son appui aux parties souverainistes et d’utiliser la situation comme prétexte pour réclamer des lois assurant le droit au travail sans adhésion syndicale obligatoire pour les fonctionnaires du secteur public fédéral.
En Ontario, le chef conservateur Tim Hudak avait déjà publié un document d’orientation réclamant des lois assurant le « droit au travail sans adhésion syndicale » dans la province. L’attaque mesquine de Tim Hudak contre les travailleurs et travailleuses était l’une des nombreuses raisons pour lesquelles les conservateurs ont perdu leur ancien château fort à Kitchener—Waterloo. Le lendemain de l’élection partielle, Tim Hudak a blâmé un « tsunami de chefs syndicaux » pour sa défaite électorale.
Les résultats de l’élection au Québec et en Ontario sont ce qu’ils sont pour de nombreuses raisons, mais cela n’empêche aucunement les conservateurs – qu’ils soient à Ottawa ou à Toronto – de chercher des boucs émissaires pour leurs échecs et, évidemment, leurs boucs émissaires de prédilection sont les organisations qui défendent bec et ongles les intérêts des familles ouvrières.
Nous ne devrions pas nous étonner pour une raison ou pour une autre.