Blogue politique : Après la pandémie, nous devons nous protéger contre un retour à l’austérité

Toronto – 21 mai 2020 – Alors que le Canada est toujours aux prises avec la pandémie de la COVID‑19, nos efforts d’éloignement physique et autres mesures ont contribué à ralentir la propagation du coronavirus, au point où les gouvernements envisagent maintenant de redémarrer lentement certaines parties de l’économie. Toutefois, alors que nous nous penchons sur ce à quoi le Canada pourrait ressembler après la pandémie, nous devons nous méfier de ceux qui, une fois de plus, appelleront à l’austérité.

L’élite du secteur privé est restée assez discrète face aux importantes dépenses publiques du gouvernement dans des programmes aidant les gens à surmonter la crise. Ces programmes, comme la Prestation canadienne d’urgence (PCU), ont obtenu le soutien de la plupart des Canadien(ne)s et, grâce au travail du mouvement syndical et du Nouveau Parti démocratique (NPD), les libéraux fédéraux ont été poussés à offrir plus de soutien pour ceux et celles qui en avaient le plus besoin.

La COVID‑19 a révélé de terribles vérités aux Canadien(ne)s. Des décennies d’austérité, de réductions d’impôts pour les entreprises et les riches, de privatisations et de coupes dans la santé et l’éducation ont laissé le pays en difficulté face à la pandémie, tout en exposant trop de travailleurs et de travailleuses à des difficultés financières.

Un récent sondage montre qu’une nette majorité de Canadien(ne)s pensent que la COVID‑19 a mis en évidence la façon dont les travailleur(euse)s et les personnes âgées sont mal traité(e)s, ainsi que l’inégalité sociale créée par l’austérité. Le même sondage montre également que près des trois quarts des Canadien(ne)s s’attendent désormais à une large transformation de la société, une majorité d’entre eux s’attendant à voir des réformes sociales majeures pour prioriser la santé et le bien-être. Un aspect positif de la pandémie est la reconnaissance du rôle qu’un gouvernement peut jouer dans la création d’une société plus juste.

Mais ne soyons pas complaisant(e)s. Nous ne pouvons pas oublier que ceux et celles qui prônent l’austérité n’abandonneront pas les intérêts des riches et des puissants sans se battre.

Les gouvernements provinciaux conservateurs ont déjà commencé à brandir la hache de l’austérité. En Alberta, le gouvernement a licencié plus de 20 000 travailleur(euse)s en éducation et poursuit ses coupes budgétaires dans la santé et les services publics. Au Manitoba, le gouvernement songe à faire les plus importantes réductions dans le secteur public depuis des décennies.

Les sinistres voix de l’austérité commencent à entonner leur bon vieux mantra « nous n’avons pas les moyens ». Jack Mintz, l’économiste de droite par excellence, a récemment écrit que les travailleur(euse)s du secteur public sont trop en sécurité, et qu’avec les lourdes pertes d’emplois dans le secteur privé, il doit y avoir des pertes et des reculs correspondants dans le secteur public. Un autre économiste conservateur, Phill Cross, de l’Institut Fraser, affirme que nous devrons réduire les salaires du secteur public de 20 % à la suite de la pandémie.

L’ancien premier ministre conservateur Stephen Harper, quant à lui, a récemment écrit dans le Wall Street Journal que les arguments pour l’austérité pourraient rencontrer une sérieuse résistance en raison de la COVID‑19, et que les dirigeants publics doivent convaincre les gens que nous ne pouvons pas nous permettre de nouvelles dépenses sociales.

Mintz, Cross et Harper ont tous été nommés au groupe d’experts économiques d’urgence de l’Alberta pour aider la province à se redresser économiquement, et il n’est pas difficile de deviner ce qu’ils vont recommander : une réduction des impôts pour les entreprises et les riches, davantage de privatisations et de réductions de salaire, et l’élimination des emplois du secteur public et des réglementations, comme les normes de santé et de sécurité, qui protègent les travailleur(euse)s.

Cette élite a fait ce qu’elle voulait depuis des décennies et, alors qu’une petite minorité est devenue extrêmement riche, de plus en plus de Canadien(ne)s luttent pour survivre alors que l’inégalité des revenus continue de se creuser. Les conservateurs de tout le pays s’inquiètent maintenant du fait que la COVID‑19 a ouvert les yeux de nombreux et nombreuses Canadien(ne)s sur l’échec de l’austérité, et que les gens pourraient enfin exiger quelque chose de mieux.

Alors que nous sommes confronté(e)s aux retombées de la pandémie de la COVID‑19, ce n’est pas le moment de faire preuve d’austérité. Il est temps d’investir dans les travailleur(euse)s et nos services publics, d’offrir des conditions de travail sécuritaires, d’investir dans une nouvelle économie écologique, de veiller à ce que nos personnes âgées soient correctement soignées et à ce que notre système de santé puisse résister à tous les défis qui pourraient se présenter. Il est temps d’investir dans tous les Canadien(ne)s, et de dire « Non! » à ceux qui prônent plus d’austérité.