Reçus toxiques : ce qu’il faut savoir

Il existe des produits chimiques toxiques d’apparence anodine qui sont présents dans la vie quotidienne et sont absorbés par l’organisme. Le bisphénol A (BPA) et le bisphénol S (BPS) font partie de ces produits chimiques d’apparence anodine. Le BPA et le BPS sont utilisés dans de nombreuses applications, y compris la fabrication des reçus de caisse faits de papier thermique. En raison du nombre élevé de reçus que les caissières et les caissiers manipulent quotidiennement, cette situation est très préoccupante pour les travailleuses et les travailleurs du commerce de détail.

En quoi le BPA et le BPS sont-ils nocifs pour la santé?

Le BPA est un perturbateur endocrinien. Le système endocrinien produit et sécrète des hormones régulant l’activité des cellules de l’organisme et celle des microorganismes qui y sont présents; or, le BPA et le BPS peuvent nuire à ces cellules et à ces microorganismes, ce qui entraîne des tumeurs cancéreuses, des anomalies congénitales et d’autres troubles du développement.

Qu’en disent les expertes et les experts?

La représentante en santé et sécurité des sections locales 175 et 633 des TUAC Canada Mary Shaw apporte des éclaircissements sur ces produits chimiques toxiques que l’on trouve dans les reçus de caisse courants des magasins et des restaurants. « Chaque fois qu’on manipule un reçu de papier thermique, la poudre (contenant du BPA ou du BPS) se détache pour coller aux mains et elle est absorbée par l’organisme », explique-t-elle.

Le professeur Frederick vom Saal de l’Université du Missouri est un pionnier en la matière. C’est lui qui, le premier, il y a près de 30 ans, a sonné l’alarme au sujet du BPA. Il convient que les reçus de caisse enregistreuse faits de papier thermique constituent l’une des plus importantes sources d’exposition au BPA. Voici ce qu’il en dit : « Le lien entre l’exposition au BPA et les maladies humaines est beaucoup plus grand aujourd’hui qu’il y a 10 ans. Une étude a permis d’obtenir la preuve du fait que, chez l’être humain, le BPA peut causer la mort du fœtus pendant la fécondation in vitro ».

Rick Smith et Bruce Lourie sont deux des plus grands spécialistes du Canada en matière d’écologie et dans le domaine de l’étude des effets qu’entraînent les produits chimiques toxiques pour la santé. Ensemble, ils ont écrit un livre intitulé Slow Death by Rubber Duck: How the Toxicity of Everyday Life Affects Our Health (« le canard en caoutchouc qui tue à petit feu : comment la toxicité de la vie quotidienne compromet notre santé »). À l’instar de Mary Shaw, ils conviennent également qu’il est évident que ce sont les reçus de caisse faits de papier thermique qui représentent la plus grande source d’exposition au BPA et au BPS.

Est-ce tout le monde qui estime que le BPA et le BPS sont dangereux?

D’après certains organismes de réglementation, les niveaux actuels de BPA sont sans danger. Cependant, ces assertions se reportent toutes à l’exposition de la consommatrice ou du consommateur ordinaire aux emballages alimentaires contenant du BPA.Là-dessus, pour leur part, les TUAC Canada ne sont pas de cet avis : à leurs yeux, c’est sur le contact direct avec le BPA à partir de reçus de caisse faits de papier thermique qu’il faut absolument se pencher car, dans ce cas, la masse en est jusqu’à mille fois supérieure à la quantité contenue dans les boîtes de denrées alimentaires.

Sur ce point, que fait le gouvernement?

En 2010, dans le monde entier, le Canada est devenu le premier pays à interdire l’utilisation du BPA dans les biberons. De leur côté, l’Union européenne, le Brésil et la Suède ont également interdit le BPA dans les produits alimentaires pour nourrissons selon le « principe de précaution » en raison des incertitudes que soulèvent certaines études. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration a retiré l’approbation réglementaire des produits alimentaires pour nourrissons contenant du BPA et des entreprises, comme Rubbermaid, ont pris la décision de supprimer le BPA de tous leurs produits.

Il serait maintenant temps d’interdire toute présence de BPA ou BPS sur les reçus de caisse faits de papier thermique.

Que peuvent faire les consommatrices et les consommateurs pour se protéger?

1)       Il s’agit de dire « non » aux reçus pour demander aux détaillants qu’on a l’habitude de fréquenter de passer aux reçus électroniques ou aux reçus sans bisphénol.

2)       Les reçus ne devraient pas être recyclés car ils contaminent toutes les autres matières recyclables. Il faut donc plutôt les jeter à la poubelle.

3)       On peut dire au gouvernement canadien d’interdire les reçus contenant du BPA ou du BPS.

Que peuvent faire les caissières et les caissiers pour se protéger?

1)       Il y a moyen de s’y prendre en pliant le reçu avec la face imprimée vers l’intérieur puisque le verso n’en est probablement pas recouvert de bisphénol.

2)       On peut demander à l’employeur de passer au papier à reçu sans bisphénol.

3)       Il s’agit aussi d’éviter d’utiliser un désinfectant pour les mains et, autant que possible, il faut se les laver soigneusement pendant le quart de travail, surtout avant de manger.

4)       Il convient de soulever cette question avec la représentante ou le représentant en santé et sécurité au travail et de lui demander d’en parler lors de sa prochaine réunion.

Conclusion

Les expertes et les experts sont toutes et tous d’avis qu’il n’existe pas de quantité sécuritaire de perturbateurs endocriniens que l’organisme puisse absorber. C’est pourquoi il est primordial d’éliminer l’exposition des travailleuses et travailleurs au BPA et au BPS, qui peuvent perturber le système endocrinien, en cessant définitivement d’en mettre sur le papier thermique dont sont faits les reçus de caisse.

Si l’on désire agir, on peut s’y prendre en visitant la page Web située à l’adresse suivante : environmentaldefence.ca/receipts (site Web en anglais seulement).