Modification du programme d’assurance-emploi par Harper Inc. : ouverture d’un nouveau tronçon de l’Exploitation Express

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Migrant Workers in Canada:
Why we migrate
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Our hopes on Migrants Day

Depuis que le 18 décembre a été proclamé Journée internationale des migrants par les Nations Unies en 2000, un peu partout dans le monde la situation s’est détériorée en matière de protection de certains des travailleurs et des travailleuses les plus vulnérables au mondeceux qu’on appelle les « travailleurs étrangers temporaires » ou les travailleurs migrants. Sous la pression des employeurs, les gouvernements autour du monde ont sciemment supprimé les mesures de protection qu’ils offraient aux travailleurs migrantspour les laisser faire face seuls à l’injustice flagrante et à l’exploitation éhontée.

Au Canada, plusieurs gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral ont joué un rôle de premier plan dans l’élimination des protections indispensables pour les travailleurs migrants en adoptant des lois destructrices à cet égard. Malheureusement pour nous, les gouvernements canadiens ont en effet été dans de nombreux cas l’élément déclencheur de cette dégradation des droits fondamentaux. Le problème, c’est que nos gouvernements souffrent de myopie : ils adoptent des politiques en pensant au Canada de l’an prochain plutôt qu’au Canada des vingt prochaines années.

La force agissante la plus évidente et la plus belligérante derrière nos politiques publiques myopes a bien entendu été le gouvernement conservateur à Ottawa. Si nous devions citer une à une leurs attaques incessantes envers les travailleurs et les travailleuses ordinaires qui émigrent au Canada à la recherche d’une vie meilleure, cet article se transformerait en une longue dissertation. Mais ce ne sera pas nécessaire. Les agressions du gouvernement conservateur contre les travailleurs migrants, en violation des principes élémentaires de justice et d’équité, sont tellement nombreuses qu’il suffit de regarder ce qui s’est produit au cours des dernières semaines pour en trouver.

Par exemple, le 7 décembre 2012, il y a moins de deux semaines, sans en aviser préalablement les travailleurs migrants et leurs défenseurs, la ministre conservatrice des Ressources humaines et du Développement des compétences Diane Finley a annoncé des modifications réglementaires qui auront essentiellement pour effet d’empêcher les travailleurs migrants saisonniers d’accéder aux prestations parentales et de soins de compassion. Le communiqué de la ministre Finley contenait en effet la déclaration suivante :

...seules les personnes autorisées à travailler au Canada et qui ont un NAS valide pourront recevoir des prestations spéciales de l’assurance-emploi. Concrètement, les personnes dont le NAS est expiré ne seront plus admissibles à ces prestations.

Pourquoi exiger que les bénéficiaires de prestations d’assurance-emploi aient un numéro d’assurance sociale valide? Lorsque l’on examine la situation de près, la raison devient évidente. Le NAS des personnes employées en vertu du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS), par exemple, expire une fois que celles-ci retournent dans leur pays d’origine. Ce coup de jarret ne représente qu’un épisode de plus de la vaste offensive des conservateurs contre les travailleurs migrants.

Ce même groupe de travailleurs paie des cotisations d’assurance-emploi depuis le début du programme en 1966. Les travailleurs migrants employés en vertu du PTAS paient annuellement un total estimé de 25 millions de dollars au programme d’assurance-emploi. Avec les années, des milliards de dollars ont ainsi été déposés dans les coffres du gouvernement en retour d’avantages bien minces pour les assurés. Sur chaque chèque de paie, environ 30 000 travailleurs du PTAS versent ce qui revient essentiellement à un don au gouvernement du Canada.

Alors que les travailleurs migrants saisonniers cotisent au programme d’AE au même taux que les résidents permanents et les citoyens canadiens, ils n’ont jamais bénéficié des mêmes avantages. Et les maigres avantages qu’ils pouvaient en retirer jusqu’ici ont été supprimés par Stephen Harper et Associés le 7 décembre. Cette situation est aussi équitable que si vous payiez l’assurance-auto obligatoire et qu’on vous disait que vous ne pourrez jamais en récolter la plupart des avantages. Le programme d’AE semble maintenant relever plus d’un programme d’« enrichissement injuste » du gouvernement conservateur que d’un programme d’assurance.

En défense de cette nouvelle attaque débridée contre certaines des personnes les plus vulnérables de notre société, la ministre Finley a inventé un nouveau « principe » pour les prestations d’AE. Selon elle, et selon le gouvernement conservateur, « le principe fondamental du régime d’assurance-emploi consiste à fournir un soutien du revenu temporaire aux personnes qui se préparent à réintégrer le marché du travail canadien. » Ce supposé « principe fondamental » du programme d’AE va à l’encontre de volets précis du programme d’AE qui permettent à certains résidents des États-Unis et à certaines personnes travaillant à l’extérieur du Canada de recevoir des prestations. Les gens qui travaillent à l’extérieur du Canada et qui continuent à le faire ne se préparent aucunement à « réintégrer le marché du travail canadien ». Ce nouveau « principe » ne peut être qualifié que d’hypocrisie.

De tels agissements ne sont pas nouveaux pour le gouvernement conservateur. L’année dernière par exemple, après en avoir parlé sur toutes les tribunes, le ministre conservateur de l’Immigration Jason Kenney a annoncé officiellement en avril que le gouvernement avait mis en place un site Web identifiant les employeurs considérés « inaptes » à employer des travailleurs migrants. Ces « mauvais employeurs » pourraient se voir interdire de participer au Programme des travailleurs étrangers temporaires pendant deux ans. Bien que des milliers de cas aient été constatés, que le gouvernement conservateur ait reçu de la documentation sur ces abus et que les TUAC Canada lui aient fait parvenir son Livre des abus contre les travailleurs migrants, des centaines de cas sont recensés, la liste des « mauvais employeurs » du gouvernement conservateur demeure vide à ce jour.

Comme c’est le cas pour le Régime de pensions du Canada (RPC), si une personne contribue au programme d’AE, l’endroit cette personne réside une fois qu’elle a versé ses cotisations ne constitue pas un facteur raisonnablement pertinent pour le versement des prestations. Que les chèques soient envoyés à Kingston, en Ontario, ou à Kingston, en Jamaïque, cela ne devrait pas faire de différence une fois que les cotisations ont été payées. Certains travailleurs canadiens – pour une raison ou pour une autre, par exemple lors d’une retraite forcée après un licenciement – ne réintègrent jamais le marché du travail canadien. Certains de ces travailleurs pourraient même déménager à l’extérieur du pays. Ils recevraient tout de même leurs prestations en vertu du programme d’AE.

En outre, il y a des milliers de Canadiens retraités qui vivent à l’extérieur du pays et reçoivent leurs prestations du RPC après y avoir contribué toute leur vie. Ce dont il est question ici, c’est qu’il n’existe pas de politique publique rationnelle pour empêcher les travailleurs migrants de recevoir des prestations d’un programme d’assurance auxquels ils ont contribué simplement sur la base du principe que pour recevoir de telles prestations le prestataire doit être au Canada. Il faut encore une fois constater que cette nouvelle attaque de Harper et de ses acolytes sur les travailleurs migrants n’a rien à voir avec la rationalité.

Ces actions des conservateurs d’Ottawa, et les conditions générales sous lesquelles s’échinent chaque année des dizaines de milliers de travailleurs migrants, plantent de nouvelles semences d’inhumanité dans le jardin déjà luxuriant de l’exploitation, un jardin qui ne porte aucun fruit dont nous puissions être fiers en tant que Canadiens et Canadiennes. L’élimination continue des protections fondamentales et essentielles pour les travailleurs migrants est une stratégie volontaire qui foule du pied nos valeurs d’équité et de justice.

 

En toute solidarité,

 

Wayne Hanley,
Président national