Des travailleurs migrants mexicains intentent une poursuite fondée sur la Charte contre le gouvernement fédéral canadien

TORONTO (ONTARIO) – Trois travailleurs agricoles migrants venant du Mexique ont engagé une poursuite contre le gouvernement canadien et un exploitant agricole de l’Ontario pour rupture de contrat et préjudices, après que les travailleurs eurent été rapatriés sans audience ni explication motivant la cessation d’emploi dont ils ont fait l’objet. C’est la première fois que des travailleurs migrants intentent une poursuite de cette nature en invoquant les droits que leur confère la Charte canadienne

Le 30 août 2010, Manuel Ruiz Espinoza, Salvador Reta Ruiz et Jose Ruiz Sosa ont reçu des ordres de leur employeur — Tigchelaar Berry Farms, un exploitant agricole de Vineland (Ontario) — leur demandant de plier bagage et de quitter le Canada le lendemain. Les trois hommes travaillaient légalement au Canada comme travailleurs agricoles migrants dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS) du gouvernement fédéral. Selon les modalités de ce programme, les travailleurs et l’exploitant agricole signent un contrat exécutoire y compris des clauses à l’effet que les travailleurs peuvent seulement être rapatrié pour « motif suffisant ». Or, ni l’employeur ni le gouvernement mexicain ni le gouvernement canadien n’a jamais présenté aucun motif. 
 

Exposé de la demande

Les trois hommes ont maintenant déposé devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario une poursuite alléguant que la rupture des contrats de travail des plaignants constituait une violation de leurs droits en vertu de l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, y compris leur droit d’être informés des allégations qui pèsent contre eux, et le droit d’avoir une occasion valable de répondre aux allégations. D’autre part, l’expulsion unilatérale a été faite sans préavis ni indemnité de préavis, ce qui est contraire à Loi sur les normes d’emploi de l’Ontario.   

« Ce qui s’est produit ici est scandaleusement une des caractéristiques du système du gouvernement fédéral qui traite les travailleurs migrants non syndiqués comme des produits jetables »,  déplore Wayne Hanley, président national des TUAC Canada qui, en collaboration avec l’Alliance des travailleurs agricoles, gèrent dix centres de soutien pour travailleurs agricoles migrants répartis dans les diverses régions du Canada. « Sans motif ni occasion de se défendre, un grand nombre de travailleurs se font rapatrier sommairement à chaque saison tandis que le gouvernement fédéral y ferme les yeux. C’est un système impitoyable qui est censé maintenir les travailleurs dans une peur constante et sous la loi de l’industrie agricole », de dire le chef des TUAC Canada. 

Les TUAC Canada sont également membre du Niagara Migrant Workers Interest Group (groupe d’intérêt des travailleurs migrants de Niagara), qui a initialement mené enquête sur le rapatriement des travailleurs. Les avocats  Andrew Lokan et Michael Fenrick de la société d’avocats de Toronto, Paliare Roland Rosenberg Rothstein LLP, se sont associés avec CLSNS (Community Legal Services of Niagara South) pour faciliter la contestation judiciaire qui réclame des dommages-intérêts de 25 000 $ pour chacun des travailleurs rapatriés.  

Forts de quelque 250 000 membres qui travaillent principalement dans l’industrie alimentaire, les TUAC Canada sont  le plus grand syndicat du secteur privé au Canada. Pendant plus de deux décennies, le syndicat a mené une campagne visant à défendre et à maintenir les droits  de la personne et les droits syndicaux des travailleurs agricoles, et représente nombre d’unités de négociation dont certains membres sont des travailleurs migrants en Colombie-Britannique et au Québec.