Des travailleurs agricoles migrants du Mexique et des Caraïbes se font encore léser au Canada

Des travailleurs agricoles migrants se voient bloqués et se font escroquer dans le cadre d’un programme des travailleurs étrangers du gouvernement fédéral

Four of more than 130 migrant agriculture workers cheated of their pay at a Simcoe, Ontario farm complex
quatre travailleurs agricoles migrants sont parmi  les 130 qu’on a privés de leur salaire par tromperie chez une entreprise agricole de Simcoe (en Ontario).

La ferme où ils travaillaient, située en Ontario, ayant déposé une demande d’arrangement avec ses créanciers, plus de 130 travailleurs agricoles migrants du Mexique et des Caraïbes se sont fait escroquer de milliers de dollars en rentrant chez eux. Ils n’avaient pas reçu leur salaire depuis le début du mois de novembre, le propriétaire de la ferme étant parti en Californie. Ce dernier n’est d’ailleurs toujours pas revenu.

Les travailleuses et les travailleurs, qui étaient originaires du Mexique, de la Jamaïque, de la Barbade et de Trinité, étaient à l’emploi de la ferme de production de plants Ghesquiere, près de Simcoe (en Ontario). On les y avait embauchés dans le cadre du Programme des travailleurs agricoles saisonniers (PTAS) du gouvernement du Canada.

« La situation est très mauvaise », affirme Francis Gibson, originaire de la Barbade, qui est inscrit à ce programme depuis longtemps, mais qui n’avait jamais travaillé à la ferme Ghesquiere avant cette année. « Ce que je ne comprends pas, c’est qu’on ait accepté une ferme comme celle-là au programme alors qu’on savait qu’elle avait des problèmes financiers. On est venus ici et on a trimé dur pour enrichir le propriétaire de la ferme, mais nous, on rentre chez nous alors qu’on n’a plus un sou. »

Chaque année, à la saison des cultures, le PTAS fait venir plus de 22 000 travailleurs agricoles migrants au Canada, mais une fois que ces derniers y sont arrivés, le programme n’assure presque pas de protection ni de suivi en ce qui concerne les questions du logement et du milieu de travail. Il est peu probable qu’un seul des travailleurs reçoive un jour l’argent qu’on lui doit.

Les mêmes ennuis étaient arrivés à plus de 200 migrants qui travaillaient aux fermes Rol-Land, à Cambridge (en Ontario), où l’on produisait des champignons à l’échelle industrielle. En 2008, une semaine avant Noël, les travailleurs migrants se sont vu renvoyer sans préavis et, le lendemain, on les a rapatriés tandis que l’employeur s’était placé sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.

« Alors qu’on protège les employeurs, le gouvernement fédéral, indifférent au traitement injuste que subissent les travailleurs agricoles migrants, ne fait rien pour défendre les gens qui font le véritable travail », déclare le président national des TUAC Canada Wayne Hanley.

« L’interdiction de la syndicalisation en milieu de travail agricole en Ontario aggrave encore les choses puisqu’elle a pour effet de priver les travailleurs agricoles migrants des mesures de protection en matière de santé et de sécurité au travail dont ils bénéficieraient s’ils avaient une convention collective. Les gouvernements du Canada et de l’Ontario sont complices d’un système qui, au lieu de respecter les droits des travailleuses et des travailleurs, fait augmenter les profits des entreprises agricoles. »

C’est un jugement que partage l’Organisation des Nations Unies. Le 17 novembre, l’Organisation internationale du Travail, qui relève de cette dernière et a pour responsabilité de veiller aux normes du travail, a rendu une décision à la suite de la plainte des TUAC Canada et selon laquelle les gouvernements du Canada et de l’Ontario étaient coupables de violation des droits relatifs à la liberté d’association par leur façon de traiter les travailleuses et les travailleurs agricoles dans la province.  

Les TUAC Canada, forts de 250 000 membres travaillant principalement dans les domaines de la production de denrées alimentaires et de l’alimentation au détail, constituent le plus grand syndicat présent dans l’entreprise privée au pays. En collaboration avec l’Alliance des travailleurs agricoles (ATA), ils tiennent dix centres de soutien pour travailleuses et travailleurs agricoles un peu partout, de la Colombie-Britannique au Québec.