Francine Raymond, section locale 405P

Lesters
Montréal (Québec)

Francine est une militante de longue date et une femme de convictions. C’est à l’âge de 15 ans qu’elle commence à travailler chez Lesters. Elle est opératrice sur une ligne de Supervac. Lesters est une usine de transformation de viandes qui produit principalement des saucisses à hot-dog, du smoked meat et différentes charcuteries. Cette compagnie est une histoire de famille chez Francine : sa tante y a travaillé, son mari et son fils y travaillent également. Après qu’elle ait été embauchée, son oncle qui travaillait avec Huguette Plamondon, ancienne présidente du 405P, lui a dit : « Francine, on va faire rentrer le syndicat chez Lesters ».

Francine a donc fait du porte à porte et ils ont réussi à signer une majorité de cartes, cela fait maintenant de cela 38 ans. À cette époque de nombreux immigrants de l’Europe de l’Est, de l’Italie et du Portugal travaillaient à l’usine et ceux-ci étaient réticents à signer une carte d’adhésion, cependant ils lui disent qu’ils sont bien heureux aujourd’hui de prendre une retraire payée par leur régime de retraite et leurs enfants travaillent aussi à l’usine.

Francine est une femme qui ne tolère pas l’injustice. Les conditions étaient difficiles au début dans l’usine pour les femmes. Contrairement aux hommes qui osaient affronter les contremaîtres, les femmes ne disaient rien et ne se plaignaient pas lorsque les contremaîtres étaient agressifs et leur mettaient de la pression. Elle se souvient bien lorsqu’en 1976, le directeur de production est arrivé saoul à l’usine et a commencé à harceler une de ses collègues. Francine s’est portée à sa défense et à titre de représailles, on lui annonçait qu’elle était transférée de nuit.

Elle a refusé et a quitté l’usine pendant quatre ans pour y revenir en 1980 après que le patron en question ait été congédié. Mais selon Francine, les choses ont changé depuis ce temps à l’usine. Elle s’est battue contre certains préjugés qui faisaient en sorte que les femmes n’avaient pas accès à certains emplois tels que chauffeur de chariot-élévateur. Maintenant, les femmes peuvent aller partout dans l’usine et prennent des cours pour conduire les chariots-élévateurs. Les femmes s’affirment plus et prennent leur place : « Elles ne se laissent plus piler sur les pieds » dit-elle.

Francine a siégé pendant trois ans comme co-présidente et a été déléguée à la santé et à la sécurité pendant six ans. Bien qu’elle n’ait jamais occupé le poste de déléguée syndicale, elle se dit être les yeux et les oreilles du syndicat. Lorsqu’elle est témoin d’incidents, elle les rapporte tout de suite au délégué. Nombreux sont ceux et celles qui vont la voir pour lui poser des questions. Même pendant ses vacances, on lui téléphone à la maison. Elle n’a pas peur de parler pour ceux qui n’osent pas le faire. En plus d’être déléguée à la santé et à la sécurité, Francine est également secouriste et c’est donc elle qui prodigue les premiers soins.

Pour Francine, un grand défi qu’il reste à relever est d’inciter la main-d’œuvre immigrante qui vient désormais en grande majorité d’Asie à s’impliquer dans la vie syndicale de l’usine. « Ce sont eux notre relève », dit-elle « Sans relève comment allons-nous conserver nos acquis ? ». Lorsqu’ils se blessent, Francine les informe sur leurs droits et sur la possibilité qu’ils ont de réclamer d’être indemnisés. Beaucoup n’osent même pas aller se faire soigner de crainte de perdre leur emploi. Elle est d’avis que c’est en les éduquant syndicalement que ces personnes viendront à s’impliquer. Elle les invite à venir aux assemblées syndicales ce qu’ils ont fait lors de la dernière assemblée de ratification de leur convention collective.

Sans syndicat, Francine est d’avis qu’elle n’aurait pas continué à travailler chez Lester. Elle termine en disant que tant qu’elle aura la santé et la force pour le faire, elle continuera à se battre pour protéger ses collègues de travail.